Vous pensiez qu'il n'y a que les stars qui se font avoir par le Cloud? Sachez que l'article ci dessous a été écrit deux fois... Merci la "synchronisation en cours"!
Bon c’est vrai qu’arrivés
devant le comptoir, c’est un peu le manque d’inspiration : on n’a pas tous
les jours l’occasion de prendre un verre avant la première pause du matin… Et
encore moins un whisky. Brut en plus, pas dans un café. Seule entorse au
comportement des puristes, nous avons droit de commander « on the
rocks » (et bien entendu Marie pourra prendre un jus d’orange, ils ne vont
pas t’obliger à consommer de l’alcool). Julie tente donc l’Irish Honey, Michel
le « Distillery Reserve » et moi le « Old Bushmills » pour
que nous puissions bien tâter les différences. Et elles sont presque palpables :
même si au goût j’ai toujours une préférence pour l’Irish Honey, on sent bien
que c’est une liqueur et pas le vrai whiskey. Pour ce dernier, dur de se
prononcer entre le 10 et le 12 ans d’âge. Ayant une affinité avec ce dernier
nombre (ah, la science du Douze, c’est presque une religion), mon cœur choisit
vite, tandis que le palais reste confus. Nous profitons un certain temps de
notre petite tablée dans l’usine, avant de se prendre en photo devant l’un des
gigantesques alambics (vide) présents dans la salle.
Juste ensuite, c’est le
magasin. Nous y entrons avec une idée très simple en tête : prendre chacun
une ou deux bouteilles, et reprendre la route. Mais bon… Vous l’aurez compris
depuis le début du récit, il n’est jamais facile de quitter une enseigne qui
propose du marketing bien orienté. Voilà pourquoi on va me retrouver cinq
minutes plus tard, à me demander de quoi j’aurais l’air avec une parka
Bushmills. Ou bien une polaire Bushmills. Un chapeau, non, un bérêt Bushmills.
Heureusement que Julie veille au grain, même si elle-même hésitera sur la
pertinence de la parka. Mais au final, nous épuiserons plus vite la partie
épicerie, en se montrant imaginatifs sur de petits présents à ramener à nos
parents (après les habits, ce sont les confitures Bushmills…). C’est-à-dire, en
plus de nos « bonus » quoi. Eh oui, on les avait presque oubliées,
les surprises de nos allemands, mais elles ne sont pas à négliger : une
mini-bouteille d’Irish Honey pour chacun ! C’est vraiment la classe. Mais
ce qui nous convainc presque immédiatement, c’est la possibilité de faire
dédicacer des bouteilles de douze ans d’âge « Distillery Reserve »
qui déjà comme leur nom l’indique, ne sont vendues qu’ici, à Bushmills.
Marie et Michel se sont aussi
laissé embarquer par l’histoire des dédicaces, et nous ressortirons de l’usine
les bras chargés. Les valises vont devoir faire une cure de rangement pour
supporter ces derniers petits ajouts ! Il suffira de ne plus rien acheter
ni aujourd’hui ni demain, et tout sera parfait… Je me charge avec Michel de
ranger le coffre, tandis que les filles décident de récolter notre repas de
midi dans le Spar juste en face. Nous pouvons bientôt quitter la ville, qui fut
à la fois l’un des objectifs avoués du voyage, et un extraordinaire lieu à
vivre. Pour le reste du programme c’est tout simple, nous longeons la côte vers
l’Est, en tentant de repérer les points les plus remarquables. Le road trip
dans son sens le plus littéral, quoi ! Nous passons le long du visitor’s
center des marches des géants, déjà encombré à cette heure des centaines de
touristes massés sur ces bizarres hexagones. Mais notre premier arrêt n’en sera
pas si éloigné. La carte indique des ruines fichées sur une colline, mais il
faut avouer que je m’arrête plus pour ma vessie que pour toute autre raison. Nous
programmons le GPS, et le second arrêt sera pour la grande plage de sable fin,
à l’autre bout des falaises de la Giant’s Causeway.
Voilà, ça c’est une plage, pas
une bande de sable. Non, tu vois, une plage de cinq-six kilomètres, ponctuée de
petites dunes de sables et de stries créées par la marée sur des centaines de
mètres de large. On n’y accède pas si facilement d’ailleurs, nous qui sommes en
chaussures de ville, puisque le parking n’est pas directement à côté, et que
descendre de ce haut plateau sur un sentier ensablé au milieu des hautes herbes
se révèle vite un peu casse-gueule. Il y a aussi la menace latente des vaches,
à la fois intriguées par notre présence dans l’enclos, et concentrées sur leur
tâche sans fin de mâcher et mâcher encore. Cependant, elles n’ont pas ce petit
côté nerveux de leurs consœurs auvergnates et nous arrivons sur le bord de mer
sans trop de problèmes. Outre le fait de marcher le long de l’écume et de
sentir nos pieds s’enfoncer doucement dans ce sable fin, il y a même une raison
tout à fait légitime pour laquelle nous sommes descendus jusqu’à hauteurs des
rouleaux. En effet, si nous sommes dans
la confidence de la présence d’un futur bébé, nos amis aimeraient bien faire
une vidéo qui ferait office d’annonce officielle.
Mais ce qui s’annonçait comme
une idée à la fois originale et spontanée ne va pas s’avérer si facile. Il y a
déjà le problème du son : il a beau faire un temps magnifique, les embruns
produisent un son assez remarquable, tandis qu’un petit vent nous ébouriffe.
Voilà pourquoi, en tant que réalisateur officiel de cette vidéo (oui, on est
très vite promu sur ce genre de petit tournage), j’ai un peu peur que le
message final ressemble à « bonjour à tous ! Nous
cheouchroufhchchroufhcrhchrhcherchouf bébé chroucfofourouchouchouf », ce
qui avouons-le, atteint le but recherché mais manque de style. Il y aura aussi
quelques prises car s’il est facile de s’imaginer parler à la caméra, une fois
que « ça tourne », les mots ne viennent pas forcément dans le bon
ordre. Dans tous les cas, ils ont su garder une relative spontanéité, et
délivrer leur beau message… J’avoue que même si le texte n’était pas de moi
(« on a fait un gosse » n’a pas été retenu dans la sélection finale),
c’était émouvant, simple et plein de petites licornes chevauchant leur arc en
ciel. On profite encore un peu du bruit absolument unique de ces vagues venant
se briser sur le sable avant de remonter prendre la voiture.
Le prochain arrêt est à
nouveau tout proche, mais notre ami le GPS a failli nous le faire rater
(« eh c’était à gauche »). Et puis, j’ai d’abord cru qu’il se fichait
de moi. Cette route minuscule, qui zigzague dans les rues d’un minuscule
hameau, est censée nous amener au port de Ballintoy ? Eh bien… Oui, mais
ce n’est pas aussi simple. Le village est au sommet d’une falaise érodée par
les millénaires, et le versant plonge doucement vers l’eau, avec la route qui
s’y accroche avec des virages assez désespérés. Tout en bas, niché dans la
pierre et dans une formation naturelle extraordinaire, le minuscule port de
Ballintoy nous accueille avec sa demi-douzaine de bateaux. De petits caboteurs
de pêche, peints de couleurs vives et se balançant doucement sur leur amarre.
Il y a de la place pour se garer (et même deux bus, ce qui veut dire qu’on aurait
pu les croiser sur la route : allumage de cierge garanti), aussi nous
décidons de faire un petit tour de ce paradis défiant la mer.
Il faut dire qu’ici, tout est
un savant mélange entre la main de l’homme qui a façonné la digue et aplani le
port, et la nature, puissante et sauvage, qui a créé cette pointe de roches
extraordinaire qui protège cette petite crique. Les vagues viennent s’écraser
dans de bruyants et splendides ressacs sur les blocs de basalte… Ces derniers
hésitant entre la forme classique des pierres de Bretagne, érodés mais
puissants, et celle de la Giant’s Causeway (qui n’est qu’à une trentaine de
kilomètres par la mer) avec ses facettes géométriques. Une fois encore, la
beauté de la scène est saisissante, rehaussée si c’était encore possible, par
quelques détails humains qui apposent une touche mélodique à l’ensemble, comme
ces lampadaires qui viennent relier ciel et terre sur les clichés. Nous
resterons quelques temps, à tenter de capturer les gerbes d’eau salée s’en
allant vers le ciel alors que meurent les vagues pour se reformer quelques
secondes plus tard. Tout est là, le vent de mer, les sons de bouillonnement de
l’eau, les embruns et même ces petites touffes d’herbe qui envers et contre
tout, s’acharnent à vouloir prospérer ici, dans ce maelström de la côte
irlandaise.
Le temps passe trop vite, et
il faut déjà remonter la pente abrupte. Après deux « je vous salue
Marie » nous nous engageons sur la route, et par chance n’aurons pas à
croiser plus qu’une autre voiture de location. Nous voici revenus sur la
nationale pour un autre saut de puce et une autre aventure. En effet, il y a à
quelques kilomètres de là un roc avancé sur la mer, relié au continent par un
pont de corde. Carrick a rede, comme l’ont appelé les locaux, a tout l’air d’être
un sympathique petit coin de paradis entre les vagues et les oiseaux nichés à
flanc de falaise. Malheureusement, il semble que nous soyons rejoint dans notre
quête par une bonne partie des visiteurs de ce beau pays. Nous n’en avons pas
croisé tant que cela jusqu’ici, aussi c’est la vraie surprise lorsque nous
arrivons dans un parking géré façon parc d’attraction : des guides nous
amènent jusqu’à notre place, il y a des bus, un service d’ordre… Immédiatement
nous sommes refroidis.
Même si nous enfilons nos chaussures de marche, le
pressentiment est très clair, parce qu’il ne peut y avoir autant de familles au
même endroit sans qu’il soit un peu… dénaturé. Nous profitons quand même de
leurs sanitaires, avant de s’avancer vers le site. Et finalement, ce sont deux
facteurs qui vont nous faire reculer. Le prix d’abord, parce que 5,6£ par
personne, c’est beaucoup pour un pont de corde et un rocher. L’affluence
ensuite : on est effectivement plus dans une ambiance de parc d’attraction…
Pour vous dire, il y a même des panneaux de signalisation d’attente. Et il y en
a pour minimum 20 à 30 minutes ! Donc non. A titre de consolation, une
grande table d’observation des oiseaux nous apprend que notre pingouin volant
de Downpatrick’s Head était un Guillemot. Maintenant, il est midi, nous allons
repartir et nos estomacs grondent !
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